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--> Petit séjour chez mère-grand
Milieu de semaine dernière, une réponse à un appel d'offre en passe d'être bouclée et une petite éclaircie à l'horizon malgré l'ambiance stakhanoviste de ces dernières semaines, je décide de poser 4 jours de vacances (oui, pas 5 parce que le vendredi je dois intégrer un petit nouveau).

Le boss tire un peu la gueule, il est à la bourre sur d'autres projets, mais bon, j'ai déjà bossé 2 we de suite, mes dossiers sont (à peu près) à jour, et puis il est quand même sympa dans le fond, alors départ. Il trouve quand même moyen de me faire rester le samedi jusqu'à 21h, heure à laquelle je réussis enfin à m'évader, direction le bistro et les potes. La soirée est disons ... mouvementée (dire que j'avais juré de rentrer vers minuit-une heure grand maximum... je suis un faible), mais j'arrive quand même à comater une heure et demie avant de me lever pour préparer mon sac et prendre le TGV direction Paris.

Compte tenu :

1) de la gueule de bois monumentale qui me travaille
2) du fait que j'aie du marcher 20mn jusqu'à la gare sous la flotte avec un sac lourd sur l'épaule
3) de la pénurie de nourriture au buffet de la gare et du prix exorbitant des rachitiques sandwiches sncf
4) de cette saloperie de clim de TGV qui me fait un courant d'air froid dans le cou
5) des douaniers qui sont persuadés que je transporte de la drogue quelque part
6) des deux homos qui papotent comme des commères à côté et m'empêchent de dormir
7) qu'en plus ils se mettent par moment à chanter, et que ça me réveille quand j'ai par miracle réussi à m'endormir

Le voyage est assez pénible.

J'arrive à destination un peu après midi, la famille est là au grand complet, sauf un oncle avec qui je suis de toute façon fâché. Tant mieux. A ma grande surprise, j'ai beaucoup de plaisir à les revoir tous. Ils m'ont manqué et je ne m'en étais même pas rendu compte, quel gros nul. On passe un dimanche après-midi à discuter, regarder d'un oeil la finale de la coupe d'Europe de rugby (je gagne d'ailleurs un pari contre le mari d'une cousine), et jouer à la belote.

Le soir, ma grand-mère sort des vieilles photos, et de vieux dessins. Bien que certaines photos remontent aux années 1890, et certains portraits jusqu'en 1870, elle sait toujours qui est qui, et dans une certaine mesure l'histoire de leur vie. Et elle arrive presque toujours à raconter d'une manière étonnante ou drôle les histoires de ces gens normaux. Au détour d'un album, il y a un portrait du père de son père, posant fièrement devant sa petite ferme, lui et toute sa famille (5 fils, 2 filles), avec sa grosse moustache et son visage austère. Elle me dit qu'elle aimerait bien retrouver cette maison un jour, elle se demande si elle est toujours habitée par des gens de la famille. Comme elle connaît le nom du village et qu'il n'est pas trop trop loin de Paris, je lui propose d'y aller le lendemain. Elle rigole, me demande si je suis sérieux, puis dit oui.

Après une trop courte nuit de plus, me voilà donc en train d'aller louer une petite voiture, et d'y embarquer mère-grand pour le fin fond de la Picardie. On achète une carte routière en chemin, et on se met en route pour la Somme. Au risque de choquer les indigènes, la Somme ça me paraît quand même un peu pourri comme endroit. Il n'y a que des cimetières militaires qui viennent rompre la monotonie du paysage. On finit par trouver le fameux bled, quelque part entre Péronne et Bapaume. On y trouve même une auberge où on mange du foie de veau, pour le plus grand bonheur de ma passagère. Photo à la main on demande à droite et à gauche, si quelqu'un connaît la maison, on finit par trouver une aïeule qui a toujours habité le village. Elle nous offre un café et nous indique où est cette ferme (la Somme c'est peut-être moche, mais les gens sont sympa). Elle est habitée par le petit-fils d'un cousin de ma grand-mère. Super accueillant, il nous fait faire le tour, nous offre un apéro, et nous montre lui aussi les vieilles photos de famille. Il échange avec ma grand-mère de vieux souvenirs de famille, lui explique dans quel cimetière militaire est enterré son oncle Etienne, tué un matin de 1918 à quelques centaines de mètres de la maison où il était né. On soupe avec lui et sa femme dans l'auberge du bled. Le retour est tranquille, bon vin et digestifs aidant, ma grand-mère ronfle comme un sonneur de cloches sur le siège passager pendant que je ramène la voiture sur Paris.

Elle me fascine. Bientôt 86 ans, une vie qui n'a de loin pas été toujours facile, mais toujours vaillante, la tête bien sur les épaules (même si elle se laisse parfois distraire à la belote, elle reste redoutable), toujours le sens de l'humour, ...
On lui a diagnostiqué un cancer du sein, les médecins voulaient l'opérer, elle a refusé ("d'abord je n'ai même pas mal"). Elle a même refusé de prendre des médicaments parce qu'elle ne veut pas perdre ses cheveux, elle veut être enterrée entière, quoiqu'en disent les docteurs. Les médecins lui donnaient 2 ans si ils n'opéraient pas, ça en fait déjà plus de 5, et elle à l'air en pleine forme. Elle dit qu'elle les enterrera tous, et je l'en crois presque capable.

Les mardi et mercredi, je glandouille à Paris entre un souper avec mon ex aux yeux caramels et les invitations des diverses tantes et cousins. Je profite du beau temps, des terrasses, j'échange des sourires avec des inconnues, et je me surprend à apprécier cette ville que je n'ai jamais aimé. J'écoute le concert des klaxons à l'heure de pointe et contemple le respect très approximatif du code de la route en mangeant un chawarma, et souris en me disant que ces jours-ci Paris me fait un peu penser au Caire. Je manque de m'étrangler de surprise quand ma cousine qui s'est mariée l'année passée m'apprend qu'elle travaille dans une ONG, et que ce qu'elle fait est éthiquement très très bien. Bref, deux jours très agréables.

Je n'ai pas à me tourmenter au sujet des sandwiches sncf pour le retour, ma grand-mère a pris les choses en main : deux demi-baguettes remplies de laitue-rillettes-tomate-cornichons, une tablette de chocolat et une bouteille de citronnade maison, je suis blindé.

Comme cette fois :

1) je n'ai pas la gueule de bois
2) j'ai assez dormi
3) je ne risque pas d'avoir faim
4) je suis assis côté couloir
5) le type assis à côté de moi est plutôt cool et a de la conversation
6) les douaniers ont décidé de s'en prendre à un Camerounais assis devant et pas à moi

Le voyage est plutôt tranquille.

Ecrit par polo_troula, le Lundi 30 Mai 2005, 21:18 dans la rubrique "On s'en fout".


Commentaires :

  Faustinia
Faustinia
31-05-05
à 07:52

mère-grand....

moi qui n'ai connu ni grands-pères, ni grands-mères, et qui adore les vieilles gens, je trouve fascinant

d'avoir des contacts et d'échanger des souvenirs avec des "monuments " de la mémoire familiale..j'envie

 beaucoup les veinards qui ont cette chance.

l'histoire de ma famille tient dans de rares photos jaunies que je fixe intensément  dans l'espoir de décrypter ce que cachent les regards sombres, et souvent inexpressifs...


  Muche
Muche
05-06-05
à 20:09

Re: mère-grand....

Oui, c'est vrai. Je me rends compte de la chance que j'ai

  gobbolino
gobbolino
31-05-05
à 21:31

ma grand mère est morte deux jours après mes dix huits ans. Elle était emplie d'Histoire ma grand mère, une vie un peu athypique... polonaise expatriée, mariée jeune,  qui a appris le français sur le tas, a travaillé longtemps et est morte d'un cancer.. si tu savais comme elle me manque.

prends bien soin de la tienne...


  Muche
Muche
05-06-05
à 20:12

Re:

Tu en a parlé dans 2-3 posts de ton défunt blog (tu vois, je suis un peu quand même). Histoire touchante...
Je crois que le fait d'être (ou d'avoir été) proche de nos grand-mères, ça nous fait un point commun de plus. Tu vois on en trouve encore ;-)

  gobbolino
gobbolino
06-06-05
à 22:32

Re: Re:

c'est vrai qu'on a beaucoup de points communs ... troublant ;o)

si tu es champion au cap's, je rends les armes ;o)


  Muche
Muche
06-06-05
à 23:09

Caramba ! Encorrrrrre rrraté

Probablement pas : c'est quoi le cap's ?

  Vendredi
Vendredi
13-06-05
à 14:18

Merci d'avoir partagé cette tranche de vie, Muche :)
J'ai lu ton texte à haute voix à partir du troisième paragraphe, pour en apprécier encore plus les saveurs...


  Muche
Muche
13-06-05
à 18:27

Re:

C'est gentil, merci Vendredi :-)